jeudi 9 juin 2011

L'OIT et les travailleurs domestiques

Au moment où j’écris ce blog, la Commission du travail domestique a mis la dernière main à un projet de Convention internationale « concernant le travail décent pour les travailleuses et travailleurs domestiques ». La CSC était activement représentée dans cette commission par Pia Stalpaert, de la CSC Alimentation et Services, et par Jeanne Devos, la religieuse belge bien connue pour avoir fondé en Inde un syndicat de travailleuses domestiques.

Comme l’indique le préambule du projet, « le travail domestique continue d’être sous-évalué et invisible, et est effectué principalement par des femmes et des jeunes filles, dont beaucoup sont des migrantes ou appartiennent aux communautés défavorisées, et sont particulièrement exposées à la discrimination liée aux conditions d’emploi et de travail et aux autres violations des droits humains ». Bref, on n’est pas ici dans le droit social de luxe, mais dans les protections de base, voire dans les droits humains fondamentaux.

A parcourir le texte, pourtant, on n’est pas non plus dans les intentions pieuses et vides de sens.

Les Etats qui ratifient la Convention doivent promouvoir et réaliser, pour les travailleurs domestiques, la liberté syndicale et la reconnaissance effective du droit de négociation collective.

Les travailleurs domestiques doivent bénéficier des mêmes droits que les autres travailleurs, notamment en matière de salaire, de sécurité sociale, de sécurité et d’hygiène, de durée du travail. La Convention précise même que « les périodes pendants lesquelles les travailleurs domestiques ne peuvent disposer librement de leur temps et restent à la disposition du ménage pour le cas où celui-ci ferait appel à eux », doivent compter comme temps de travail : un principe qui n’est pas d’application en Belgique dans tous les secteurs !

La Convention prévoit une série de dispositions concrètes, adaptées à la situation des travailleurs domestiques, notamment en ce qui concerne les jeunes travailleurs, les migrants, la sécurité et la salubrité de l’environnement de travail, la protection contre le harcèlement et la violence, les conditions de logement, les agences d’emploi, l’accès à la justice, etc…

Encore une fois, une Convention internationale n’est juridiquement obligatoire que si elle est ratifiée par l’Etat. Mais même une Convention de l’OIT non ratifiée a une incontestable autorité morale, et peut nourrir les combats politiques et syndicaux partout dans le monde.

On terminera ce compte-rendu en ajoutant qu’on ne peut certainement pas accuser cette Convention d’être l’œuvre d’occidentaux cherchant à imposer au monde leur vision de la justice sociale. L’Europe, en particulier, s’est signalée dans les discussions par une quasi absence, voire une attitude consternante de blocage et de pinaillage.

On dit que le centre de gravité économique du monde se déplace. Serait-ce le cas aussi de son centre de gravité moral, même à l’aune de la conception eurpéenne de la justice sociale ?

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